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Photo du rédacteurMathieu Marchand

Corona-récession: Reprise en V, reprise en W, reprise en L?


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-1929 peut aller se coucher.

D’un œil d’économiste, cette crise économique est vraiment spéciale. D’abord, elle a été déclenchée par un confinement forcé partout sur la planète. Après une décennie de croissance ininterrompue, l’économie est tombée d’un précipice du jour au lendemain. Les données économiques vont de -20% à -35% de l’activité économique au 2e trimestre (avril-mai-juin). Du jamais vu, même en 1929. La « dépression » de 2008-2009 fait figure de blague à côté de l’ampleur de cette crise. En même temps, les marchés financiers ne cessent d’être optimistes. Des compagnies comme Apple valent 35% plus cher en temps de récession qu’au sommet d’un cycle de croissance de 10 ans. C’est juste fou!


Mais on sait déjà tout ça. Creusons un peu sur ce qui s’est passé et sur ce qui s’en vient.


Théorie d’un choc économique suivant un virus : reprise en « V »


Je remonte à un texte du prix Nobel d’économie Robert E. Lucas (pas Georges, le créateur de Star Wars) de 1988. Il publie un modèle, sur la croissance économique, dans lequel il fait la distinction entre deux types de capitaux : le capital physique (les usines, le financement et toute les choses capitalistes que les gauchistes adorent) et le capital humain (ce que le travailleur a dans le crâne, de son éducation à l’école à son expérience à la job qui le rend plus productif).


Bien que ce ne soit pas le but de son modèle, il simule un scénario de guerre bactériologique : un virus qui détruit le capital humain (tue du monde), mais pas le capital physique. Résultat : l’économie rebondi très vite une fois que la crise est passée. En effet : les usines sont encore là, les terrains sont encore là, les avions, les hôtels et les cirques sont encore là (peut-être avec des propriétaires différents), le capital financier est encore là, il ne suffit que de remplacer le capital humain, ce qui se fait rapidement, et l’économie redémarre. De plus, le travailleur, plus rare que les usines (j’exagère pour faire comprendre le point), est en demande.


C’est, je crois, ce que tous les gouvernements et tous les investisseurs croient qu’il va arriver. Mais peut-être que le « timing » n’est pas bon.


Pour le moment, les pertes d’emploi au Canada, aux États-Unis et au Québec ont été d’une ampleur sans précédent, mais le rebond ressemble bel et bien à un début de reprise en « V ». Notez qu’en juillet, nous n’avons que repris la moitié des emplois perdus, la porte est encore ouverte pour une formation en « W » ou en « L ».


Nombre en personnes en emploi, Canada, mensuel depuis 1976

Nombre en personnes en emploi, U.S., mensuel depuis 1950

Zoom sur la situation de l'emploi au Québec, juin 2015 à juin 2020

Fait intéressant: le Québec affiche la meilleure performance au Canada et probablement aussi en Amérique du Nord (je n'ai pas vérifié les 50 États individuellement). Déconfinement plus agressif que dans le reste du pays, sans toutefois déclencher de 2e vague comme nos voisins du sud. Étrangement, personne ne souligne cela.

Ajouter une touche de réalité des entreprises : reprise en « W »


Rappelons-nous pourtant qu’une simple bulle spéculative sur l’immobilier a fait imploser le système financier mondial il y a 12 ans et produit la 2e pire récession de l’histoire moderne, avant celle-ci.


Spéculation sur des maison vs pandémie? Il me semble que la crise actuelle devrait être pire.


De ce que je vois, dans les données qui commencent à poindre et ce que j’entends dans la communauté d’entrepreneurs, c’est qu’il y a beaucoup de faillites en devenir qui ne sont simplement pas encore consommés. Dans biens des endroits, comme aux États-Unis, les tribunaux ont été fermés et les mises en faillites sont simplement en attente. Au Canada et au Québec, les entreprises se sont vues allongées des liquidités de façon quasi illimités pour survivre au confinement. Mais le mot « liquidité » veut vraiment dire « dette ». Si, au sortir du confinement, les clients ne sont plus là, l’entrepreneur est dans une pire situation encore. Si sa dette est trop importante, ou si simplement il croit avoir la vie plus facile en changeant de domaine, il fermera sont entreprise. Pour plusieurs, ce n’est juste pas arrivé encore, mais ça viendra.


La reprise en « W » veut dire qu’après le déconfinement et une reprise économique qui semble bien se dérouler, la réalité frappe et une vague de fermetures d’entreprises vient faire replonger l’économie dans un 2e creux.


En profiter pour faire le « ménage » des employés : reprise en « L »


Triste réalité, mais que je vis de façon personnelle avec des proches. D’abord, parce qu’au retour au travail le consommateur n’est pas au rendez-vous, l’entreprise se voit obligée de mettre du monde à pied. Ensuite, face à l’incertitude, l’entreprise veut réorienter ses activités et peut-être fermer ses lignes d’affaires les moins profitables (et les employés qui vont avec). Finalement, sortant d’une période de pénurie de main-d’œuvre où des employeurs devaient se contenter de ce qu’ils trouvaient, l’occasion est « belle » (du point de vue du méchant patron) pour congédier les employés les moins bons et peut-être même en recruter de meilleurs dans le nouveau bassin de chômeurs.


La réalité « mécanique » au Canada est que l’employeur pouvait congédier temporairement ses employés pendant 6 mois sans devoir leur donner leur 4%. La PCU était là pour 6 mois pour les aider, ce qui était d’ailleurs un incitatif pour que les employeurs suspendent plus d’employés qu’ils n’avaient besoin de le faire. Également, avec les normes du travail, il n’est pas toujours aisé de congédier un employé qu’on aime moins sans justification. Or, il y en a une belle justification maintenant : manque de travail.


Je n’ai pas de chiffres officiels, mais mon PIF, et ce que j’entends, dans certaines entreprises, 10 à 20% d’employés qui étaient en « suspension » ont reçu leur 4% officiel. D’autres le recevront sûrement à la fin de l’été.


La reprise en « L », c’est qu’après un rapide rebond, en « V » ou en « W », il y a un nombre de chômeurs trop important et la consommation ne revient pas au niveau antérieur. L’économie stagne pendant quelques années.


C’est le scénario qui me fait peur.


Le chômage est passé de 6% à 9% au Canada lors de la crise de 2008. Il a fallu attendre 2017 pour revenir à 6%. Nous sommes passé de 5.5% à 14% de chômage lors de cette crise, nous sommes revenus à 10.9% (9.5% au Québec). Ça peut être très long avant de revenir au niveau précédent.


Voici une belle compilation qui n’est pas de moi, mais qui vaut la peine de partager. Il a fallu 76 mois pour récupérer les pertes d’emplois de la récession de 2007! Imaginez, le rebond actuel n’est pas encore au niveau du pire creux des précédentes récessions.


Temps pour récupérer tous les emplois perdus de la dernière récession, U.S.


Investissement des entreprises : On met tout sur pause!


Imaginez que vous êtes une entreprise traditionnelle, vous avez un petit commerce, un restaurant ou une compagnie de services au consommateur quelconque. Vous préparez un projet d’expansion depuis plusieurs années, vous étiez supposé le mettre en branle en mars! Est-ce le bon moment pour débourser? Probablement pas.


L’investissement est la variable économique la plus volatile et souvent celle qui vient confirmer les récessions. La chute des achats des entreprises vient plomber les revenus des entreprises spécialisées qui ne sont pas en lien avec les secteurs touchés (tourisme etc.). C’est là que l’effet domino des pertes d’emplois s’enclenche.


Il y a un bémol ici. Cette récession a également été une transformation en « économie de guerre ». Fabrication de masques et d’équipement de protection domestiquement, transformation de distilleries en désinfectant, installation de panneaux de plexiglass partout, et, évidemment, tout ce qui touche le télétravail et le confinement à la maison. Les pertes des uns ont été les gains des autres. Si bien que l’investissement, selon les données préliminaires américaines (les données Canadiennes ne sont pas encore compilées), a chuté, mais pour le moment, de façon modérée.


US : Formation brute de capital fixe, trimestriel

Particularité des pertes d’emploi : concentré dans certains secteurs moins payants


Ça s’est dit et redit, la restauration, l’hôtellerie, le tourisme et les commerces associés et aussi tout le secteur de la culture sont fortement, voir mortellement, touchés. Or, sans diminuer la valeur de ceux qui y travaillent, ces secteurs représentent 1% (culture), 2% (hébergement et restauration) et 6% (commerce de détail, ce n’est pas tout le secteur qui est affecté) de l’économie. C’est donc dire que même si nous avons perdu 10% des emplois, la chute du PIB sera moins que 10%.


Évidement, les données sur le PIB ont un retard par rapport aux données sur l'emploi. Voici ce que vous pouvez vérifier par vous même sur le site de Statistiques Canada.


Taux de croissance du PIB, Canada, jusqu’à mai 2020

Attention aux données mensuelles. Les politiciens sans scrupules utiliseront ces chiffres pour mieux paraître. Rappelez-vous simplement: si vous chutez de 50%, vous devez rebondir de 100% pour revenir au point de départ!


C’est un aspect positif à prendre. La chute de la demande sera moins forte et le reste de l’économie pourra recréer des emplois plus rapidement. Ils ne seront pas nécessairement dans les mêmes domaines cependant.


Stimulus économique : les gouvernements ont sorti le bazooka


Il y a ça. Les gouvernements partout sur la planète ont sorti la planche à billets et jeté de l’argent au problème comme jamais depuis la 2e guerre mondiale. Pour plusieurs chômeurs, le 2000$ de PCU était plus payant que le salaire qu’ils faisaient avant. Évidemment, tant qu’il y a de l’argent dans l’économie, l’économie roule. On l’a vu dans bien des endroits : inflation et pénuries de tout, des épiceries aux quincailleries jusqu’aux télé 75 pouces et aux pièces d’ordinateur de dernière génération qui s’envolent comme des petits pains chauds. Je n’ai jamais vu ça! Évidemment, les usines ont été fermées et l’argent a continué de couler à flot.


Il y aura pourtant une fin, et une énorme facture à payer.


La PCU prend fin ce mois-ci. Les prestataires l’ont pratiquement tout dépensé, souvent sans s’en mettre de côté pour payer l’impôt qu’ils devront payer l’an prochain. Que vont faire les sans-emplois, surtout ceux qui ne sont pas admissible à l’assurance emploi (presque tous les chefs de petite entreprise et travailleurs autonomes) en septembre?


Imprimer de l’argent en quantité industrielle comme cela VA créer de l’inflation et diminuer la valeur de la monnaie. On le voit avec le prix de l’or qui augmente : c’est parce que la monnaie de papier (même si on devrait l’appeler la monnaie PayPass) vaut moins cher.


Ensuite il y aura une énorme dette à supporter. On emprunte au futur. Tout cet argent emprunté pour dépenser aujourd’hui, c’est de l’argent que nous n’aurons pas pour dépenser demain. Ça va se traduire par une croissance économique à long terme encore plus lente.


Comment la mécanique fonctionne en réalité? Le ou les gouvernements s’endettent avec des déficits records, et la Banque du Canada achète la majorité de cette dette en « imprimant » de l’argent. J’en ai parlé en avril dans mon article sur la Monnaie de Cartes. Voici où nous en sommes : le bilan de la Banque du Canada est passé de 100 000 à 500 000 millions $ en 3 mois. Êtes-vous capable de visualiser ce chiffre, 500 000 millions? C’est 500 000 000 000 $. C’est de l’impression d’argent pur et simple, sans commune mesure avec ce qui s’est passé dans l’ère moderne.


Bilan de la Banque du Canada, en millions $


Non, en fait l’Allemagne de 1930 a fait la même folie. Nous savons la direction que l’histoire a prise ensuite.


« Chérie, j’m’en va acheter du lait! »


À quoi s’attendre


Il y a 100 ans, au sortir de la Grippe Espagnole, le monde occidental entra dans les années folles : une décennie d’euphorie économique. Je doute que ça se reproduise.


La fin de la PCU va donner un choc à l’économie. Les difficultés dans le renouvellement des mesures d’aide aux États-Unis risquent d’en faire tout autant. Nous serons passé d’un chômage de 4,5% à 10% qui risque de perdurer, sinon, même, augmenter. Une bonne partie, dont les travailleurs autonomes et les propriétaires d’entreprises en faillites, n’auront pas accès à l’assurance emploi régulière. Il y aura de la misère bien réelle. Et nous pouvons nous attendre entre 2 et 5 années avant que l’économie ne recréé tous les emplois qu’elle a perdus. Avant d’aider des investisseurs à conserver la propriété d’un quelconque cirque ou compagnie d’avions, personnellement, j’aiderais ces gens-là.


Le bazooka de mesures prises par les gouvernements va certainement amoindrir le choc, mais à quel prix? Vous verrez de l’inflation, les premiers touchés dans ces moments sont les retraités avec des pensions faiblement ou pas indexées. Ceux-là même que nous tentons de sauver du virus. Mieux vaut vivre pauvre et en santé plutôt que riche et malade prendra tout sont sens ici!


Ensuite, il faudra supporter cette dette. Mon humble avis, oubliez les promesses électorales de « baisses d’impôts » dans un avenir réaliste. Le politicien qui vous le promettra vous mentira. En fait, ils vont aller dans l’autre direction, probablement plus fortement sur les riches. Ou alors, ce sera peut-être un moment pour sortir les ‘’taxes vertes’’. Cette hausse se fera surtout au fédéral qui a payé la grosse part des frais. Ce sera intéressant de voir la nouvelle dynamique que ça va créer. C’est bien connu : on aime moins celui qui nous prend plus d’argent.

Mathieu Marchand

Le Vulgaire Économiste

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